samedi 20 décembre 2008

Où il est prouvé que le danger ne vient pas toujours d'où on l'attend


"On fit sonner le tocsin dès que la nouvelle parvint de la bouche du ministre de l'Intérieur.

"L'ultra-gauche est de retour!", hurla-t-on, avant de se terrer dans nos caves, pour ne pas avoir à croiser la route des héritiers d'Action Directe.

La menace gauchiste était imminente. Alors que les financiers et leurs aléas ébranlaient notre Monde précipitant milliers de gens dans la plus grande précarité, un danger plus sensible se dressait contre nos vies.

La mouvance dite "anarcho-autonome" était prête à déclencher une vague de violence inouïe dans la société. Leur haine contre l'état et le système marchand pouvait se manifester à n'importe quel instant.

Heureusement, la maréchaussée fit son devoir, et débusqua en Corrèze les histrions qui voulaient provoquer une guerre civile dans l'Hexagone. Sur le Plateau de Millevaches, à l'abri des regards, étaient établis les conspirateurs. Dans le village de Tarnac, ces derniers s'adonnaient à de coupables activités, telles l'agriculture biologique et la tenue d'une épicerie solidaire. On trouva à leur domicile, des brochures appelant au renversement du système. Ce détail contribua à forger dans l'esprit de la Police, que ces gens-là étaient impliqués dans de récents sabotages de voies ferrés.

Notre pays était donc sauvé d'un péril dont nous ignorions jusqu'ici l'existence. Tout le monde faisait fi du principe de présomption d'innocence, qui sied d'ordinaire à toute personne suspecte d'activités illégales. Nous pouvions sortir de nos caves la tête haute, sans avoir à faire aux hystériques hordes anticapitalistes. Les gazettes nous conseillaient toutefois la prudence car la Police affirmait que la mouvance anarcho-autonome regroupait, "trois à cinq cents individus déterminés".

Dans les murs de la Sorbonne, le danger anarcho-autonome était connu de tous.
À la suite de mouvements étudiants contre le projet d'autonomie des Universités à l'automne 2007, plusieurs individus se réclamant de cette mouvance s'illustrèrent en éditant brochures et tracts où l'on incitait le peuple à la révolte. La lecture attentive de ces écrits nous fit bien comprendre le péril hissé face à nos genoux tremblant de peur.

Mais hélas pour la maréchaussée, ce n'était pas contre le Grand Capital ou l'état, que leur violence se manifesta. Mais bel et bien contre la langue française. Sous leurs plumes vengeresses, les autonomes maltraitaient l'orthographe, rudoyaient la syntaxe, se moquaient de la concordance des temps et des accords de participes les plus élémentaires.

On peut prétexter à leur corps défendant que ces tracts rédigés à la va-vite, se souciaient davantage du contenu que de la forme. Mais une telle violence contre la langue de Molière fit davantage sourire qu'inquiéter.

La seule institution que ces derniers attaquèrent véritablement était en fin de compte l'Académie Française, celle qui fixait les règles dans lesquelles notre langue devait être écrite.

Et sur ce point ne peut-on pas leur donner raison? Est-il normal que ce soient d'illustres grabataires, ou vieillards séniles incontinents qui fixent la norme de notre langue?

L'abbé Rode, Clignancourt, de Néhendertal à nos jours.

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