vendredi 20 février 2009

Encanaillons-nous avec les enseignants

Le propre des luttes homériques est de rester longtemps inséré dans le coeur des hommes qui les menèrent. Aussi, la jubilation est toujours présente dès qu'il sagit de se souvenir de ces instants magiques où l'on troqua sa servitude pour les habits bien plus reluisants de la subversion.



Aux dernières nouvelles, nous n'avons toujours point réussi à ce que la baronne Pécresse cesse ses infamies. Cette dernière refuse toujours de céder, quitte à vivre une situation dont l'inconfort risque de la rendre folle à lier.



Toutefois, les fiers flibustiers que nous sommes pouvons nous gargariser d'avoir mené une lutte exemplaire. En attendant que sa Sérénissime Blondasse ne succombe sous nos coups, fêtons dignement ces quelques semaines de luttes, et revenons sur les quelques héros qui se distinguèrent particulièrement contre la sottise gouvernementale.



Hormis sa majesté Lulu 1er, dont nous décrîmes la semaine passée, le surprenant virage, d'autres figures nous furent précieuses dans le combat.



Monsieur Telliez de Florac, médiéviste et cévenol de son état, était de toutes les mobilisations contre la méchanceté des gens de pouvoir. Admirateur d'Alcuin et de Bède le Vénérable, notre ami présentait une allure physique solide et fière. On l'identifiait aisément à son accent rocailleux, et à son courage intellectuel. Quand tant de ses confrères se montraient horrifiés par le spectacle des révoltes étudiantes, lui venait les rejoindre, donnant de sa voix reconnaissable parmi tant d'autres pour appeler à la lutte contre l'infamie gouvernementale.



Mademoiselle de Corrèze, que des cuistres osent appeler "Nathalie", fit elle aussi le choix de l'audace en s'opposant avec vigueur et rigueur contre la vilénie des crapules sévissant dans les ministères. Si sa voix était imprimée d'une certaine douceur, les mots qui sortaient de sa bouche étaient d'une rare violence. Elle était issue du Limousin, une terre qui fut toujours l'abri d'illustres canailles subversives, à un point tel, qu'on la surnommât à la fin du XIXème siècle "la Rome du Socialisme". Malgré une allure en apparence frêle, Mademoiselle de Corrèze bravait les vilains pouvant lui faire face avec un courage certain. Son mode de vie était très spartiate, pour une raison évidente; sachant le Grand Soir proche, il fallait qu'elle fusse opérationnelle physiquement et intellectuellement en cas d'insurrection généralisée. Tout juste pour honorer ses origines, se permettait-elle d'avaler hebdomadairement une très épaisse côte de boeuf de race limousine. Elle en recueillait le sang pour le boire, comme elle présageait de le faire pour les tristes sires de la bourgeoisie le jour où la révolution éclaterait. Elle constituait à elle seule, une habile synthèse de Louise Michel et de Rosa Luxembourg. Quand Mademoiselle ne conspirait pas à renverser l'ordre établi, elle était toute occupée à rédiger des thèses sur les nourrices aux épais mamelons, ou à revisiter l'originie du capitalisme à travers l'histoire des compagnies de commerce maritime durant l'époque moderne.

Don Giovanni Baptista di Delzanti était d'une élégance que l'on ne rencontre que de manière éphémère dans le carcan universitaire. Toujours tiré à quatre épingles, et le verbe haut, notre ami était un spécialiste de l'Italie Médiévale, celle où germa la grande Renaisance. Par son allure physique, souple et gracile, et d'une nonchalance naturelle doublée d'un ton tactiturne, il était aisé de l'assimiler à un dandy. Histrion doté d'une grande culture, capable de disserter des heures durant sur les oeuvres de Mantegna, et de Leonardo da Vinci, il forçait l'admiration de ses élèves quoique certains trouvaient ses manières fortes agaçantes. On eut dit de ce personnage iconoclaste, qu'il fut tout droit sorti d'un film de Monsieur Visconti. En le voyant, les cinéphiles avaient le sentiment de retrouver le personnage qu'interpréta Alain Delon dans Rocco et ses frères. Même assurance virile, même ténébrosité, lorsqu'il enfilait sur ses épaules un blouson de cuir et au coin de ses lèvres des cigarillos (les mêmes que Clint Eastwood dans le Bon, la Brute et le Truand). Toutefois, ce personnage à l'esprit élevé pouvait susciter l'inquiétude chez ses contemporains, quand sur son visage émergeait une barbe épaisse (comparable à celle du Mollah Omar), ou quand il enjoignait de brûler les mauvais livres d'Histoire sur la place publique de sorte qu'on les oubliât.

El Marqués de Tallon prit également part à la fronde. Il occupait la place stratégique de grand chambellan de l'UFR d'histoire de notre université. Son sens aigu de la répartie le distinguait de ses collègues. Notre homme n'avait point l'allure d'un va-nu pieds, bien que les cravates au ton vert-caca d'oie qu'il lui arrivait d'arborer suscitaient bien des railleries. Son allure rigide ne le dispensait point de faire preuve à certains moments d'une relative souplesse. Durant les leçons qu'il donnait devant des amphithéâtres où l'on se pressait à vive allure, il n'omettait jamais d'accomplir un trait d'esprit fulgurant, émettant à maintes reprises de subtils parallèles entre les gens du XVIème siècle et les tristes sires qui nous gouvernent aujourd'hui. Spécialiste incontesté et incontestable de la péninsule ibérique à l'époque Moderne, il sut toujours faire preuve d'une indépendance d'esprit louable. Une gazette que l'on trouve sur Internet a relaté comment il sut s'opposer avec force à des pressions exercées par un membre de l'actuel gouvernement pour que l'on engageât une de ses progénitures comme maître de conférences au sein de notre université. Dans une missive écrite à l'attention de la Baronne Pécresse, il dénonça cette ingérence du pouvoir public au sein de l'université avec une virulence dans le ton qui en surprit plus d'un. Quand notre homme cessait son labeur, il trouvait le repos grâce au secours d'une bouteille de Rioja ou de Marqués de Riscal, le tout accompagnée d'une assiette de chorizo ou de soubressades du meilleur goût qui fusse. A noter également, que cet éminent moderniste réfractaire à la monnaie unique, ne payait ses achats qu'en livres tournois.

Grâce à tous ces fiers compagnons, corsaires à la fière allure, toujours prompts à s'illustrer et à sonner le tocsin contre la bassesse des gouvernants, nul doute que la vilaine Pécresse, acculée devant les coups portés à son endroit, ne trouvera le secours que dans une salutaire démission.

vendredi 13 février 2009

Où sa majesté Lulu 1er opère un virage dangereux

"Il est des situations pour le moins cocasses qui prêtent aisément au sourire.

Preuve de l'impopularité croissante de notre président lilliputien, certains qui furent naguère ses serviteurs les plus zélés deviennent aujourd'hui ses contradicteurs les plus véhéments.

Lulu 1er, majesté incontestée de l'histoire moderne, en offrit un des exemples les plus étincelants.

Notre bien-aimée Sorbonne était en proie à une agitation dirigée contre la Baronne Pécresse qui entendait bousculer le train actuel des universités françaises. Pour notre ministre vénérée qui affirmait non sans culot "donner des preuves d'amour quotidiennes à la communauté universitaire", il fallait selon l'expression consacrée "faire table rase du passé".

L'enseignement supérieur en France se trouva alors dénigré avec virulence par celle-la même qui présidait à sa destinée. Conformément aux dires de notre minuscule leader, elle qualifia la recherche française de "médiocre", soutenant ainsi que dans les facultés régnaient la paresse et d' honteux gaspillages de crédits.

Il n'en fallut pas moins pour heurter la sensibilité du monde universitaire. Arguant que la France ne se plaçait qu'au dix-huitième rang mondial en matière de financement de la recherche, et que malgré le manque évident de moyens, celle-ci réussissait à se classer à un niveau très honorable, le monde universitaire ria à gorge déployée devant la méconnaissance touchante des faits de la part de la Ministre.

La plupart des réformes engagées par le gouvernement dans le domaine éducatif se trouvaient désormais toutes décriées par un très large ensemble du monde universitaire, y compris par ses éléments les moins enclins au tumulte. On ne trouva aucune voix pour soutenir les régressions annoncées, et la Fronde fut menée avec une fougue certaine par les universitaires.

Même notre Majesté s'y associa, elle qui se présentait pourtant "comme un zélateur de Monsieur Sarkozy". Lulu 1er n'était certainement pas une vermine gauchisante. Il avait même siégé au cabinet de monsieur Fillon quand celui-ci se trouvait ministre de l'éducation sous le règne de Jacques de Corrèze. Dévoué serviteur de la Droite, on lui avait en retour décerné la légion d'honneur.

C'était la première fois durant sa longue carrière que sa Majesté se trouva en grève. Cette situation le plaçait dans un inconfort certain. Il se trouva pour l'unique fois de sa vie à défiler avec ses collègues dans la rue par un temps pluvieux. Ses godillots s'en trouvèrent usés, tout comme sa chaleureuse voix, qui à maintes reprises scanda des attaques véhémentes contre le gouvernement.

Relatant à ses élèves, les raisons de sa particapation au mouvement, il argumenta sur le danger potentiel des futures réformes, qui instaurereaient davantage de copinage au sein des universités. La sélection des enseignants se feraient désormais davantage au minois du client que sur ses réelles aptitudes. Se présentant à ses cours sans assumer ses leçons, il tenait à chaque fois un discours où il raillait "la vulgarité" d'un président idéologue qui méconnaissait ses dossiers.
L'évaluation et la formation des enseignants-chercheurs furent aussi la cible de ses pertinents persiflages.

Lulu 1er, passa ainsi du statut de courtisan à celui du frondeur, n'hésitant point à claquer la bise au délégué CGT des personnels d'entretien de la Sorbonne. Découvrant non sans excitation, le monde de la contestation, il troqua son complet veston pour une flambante salopette de tourneur-fraiseur des usines Renault. Jadis aristocrate à la figure pouponne, personnage précieux au ton châtié, il adopta une nouvelle physionomie qui en déconcerta plus d'un. Le crâne recouverte d'une casquette à carreaux, sa Majesté parlait désormais le langage du peuple. Il n'hésita point en pleine assemblée générale à saluer le président Moliné d'un affecteux "Coucou Biloute! Quand est-ce qu'on va y régler son compte à cet enfoiré de Sarko?".

Notre sérénissme altesse opérait un virage dangereux. Désormais revenu de ses idéaux convervateurs, il embrassait avec fougue la cause du progrès et de la classe ouvrière. Par cartons entiers, il éjecta de son domicile tout ce qu'il pouvait contenir comme éléments de culture bourgeoise, remplaçant Roland Mousnier par les écrits de Bakhounine, et la musique baroque par une intégrale de Jean Ferrat.

Désormais proche du peuple, en épousant ses causes et sa condition, sa Majesté délaissa l'enseignement de l'Histoire Moderne, pour organiser des colloques sauvages Place de la Sorbonne, appelant de sa belle voix chaude et rauque, le peuple à se révolter.

Grâce à "Monsieur Sarkozy", Lulu1er entama un virage idéologique qui aujourd'hui encore suscite la curiosité."

Le sieur de Molinié, la Sorbonne en lutte, Histoire d'un mouvement qui fit basculer Sarkozy, éditions Kropotkine.

jeudi 5 février 2009

Où il est démontré qu'un enseignant chercheur a parfois besoin de l'étudiant


Il serait bien hasardeux de porter atteinte à l'honneur des enseignants-chercheurs de nos universités. Il faut mesurer toute l'excellence dont ces gens sont faits. L'intelligence de cette corporation n'est plus à démontrer bien qu'elle souffre de nombreux vices, comme le repli narcissique, et une certaine arrogance vis à vis des gens singeant leurs travaux et non élevés dans le même sérail qu'eux.



Il se trouve que le gouvernement de notre bien aimé Talonnette 1er, s'est fixé comme objectif d'élever le rang déjà pourtant certain de nos universités. Arguant avec son tact légéndaire que face à la compétition mondiale, "il faut se sortir les doigts du cul", notre miniscule leader confia à la baronne Pécresse le soin de réformer l'enseignement supérieur.

Dame Pécresse était une femme au visage et au sourire délicat, à la voix douce et au regard de velours. Elle présentait une allure aristocratique, à l'entendre et à la voir, il était aisé de deviner que la secrétaire d'état avait grandi à l'abri de la misère.
Dès l'été 2007, Valérie fit adopter au Parlement la loi relative aux libertés et responsabilités de l'Université. Zélée ministre, elle fit face à la contestation émanant des étudiants, n'entendant rien concéder d'autre à ces derniers que du mépris.

L'objectif de cette réforme était clair. Il fallait concéder davantage d'autonomie aux universités, tout du moins à ceux qui en avaient la responsabilité. Désormais les facultés seraient gérées comme des entreprises, le président faisant office de manager, et toutes les autres personnes y évoluant de salariés zélés rétribués à leur seul mérite.

Au nom de la sacro-sainte "performance", il ne fallait point hésiter à faire rentrer des entreprises au conseil d'administration des facultés, les transformant de fait, en centre de recrutement à destination de salariés malléables et corvéables à souhait, dénués d'un sens critique et ce en rupture totale avec la tradition universitaire.

Les étudiants, dans leur majorité, menèrent la fronde contre la réforme avec une certaine fougue sans pourtant parvenir à obtenir son abrogation. Le corps enseignant se montra timide dans la contestation, hormis quelques héroïques médiévistes à l'accent rocailleux du Sud-Ouest.

Quelques temps plus tard, les enseignants chercheurs virent leur statut modifié par décret. La baronne Pécresse entendait soumettre la corporation à des évaluations plus drastiques quant à leur rendement, et à la placer davantage sous le contrôle des présidents d'université.
Nos amis poussèrent des cries d'orfraie. Devant le caporalisme de la ministre (imitant par là très bien son mentor lilliputien), et le fait que l'on modifiât en profondeur un statut édifié en 1984, ils se mobilisèrent pour lutter contre ce qu'ils estimaient comme une ineptie totale.

Même les universitaires les moins enclins aux idéaux progressistes rouspétaient devant cette disposition. Alors pour mieux faire pression sur la ministre et qu'elle renonçât à ses funestes desseins, nos puits de science firent appel aux étudiants, si prompts au chahut. Ces dernières obtempérènt et l'on peut voir encore aujourd'hui, des étudiants et leurs professeurs, bras dessus bras dessous, vitupérer contre cette bougresse de Pécresse.

A l'heure où votre serviteur écrit ces lignes, on ignore si la ministre va retirer son décret, et s'ouvrir aux revendications de nos têtes chercheuses.
La mobilisation bat son plein, attendons de voir si devant pareille fronde, l'autisme sera toujours de mise dans cette clique réactionnaire et dévoyée qui constituent notre gouvernement.

Là où le bât blesse, c'est qu'aujourd'hui les enseignants viennent quémander le secours des braves étudiants pour se faire entendre de la Versaillaise.
Lorsque les étudiants se mobilisèrent contre le Contrat Première Embauche ou dressèrent des barricades pour réclamer dès l'automne 2007 l'abrogation de la LRU, les professeurs renâclèrent à les suivre, affichant même une certaine morgue à une jeunesse privée d'avenir.

L'étudiant est en droit d'espérer que ce n'est pour pas de seules revendications leurs étant propres, que les enseignants chercheurs poussent l'étudiant à la grève.